Difficultés à se débarrasser des biens : les raisons derrière l’attachement matériel
Six pour cent. C’est la part de la population qui, selon des études cliniques, vivrait avec un trouble d’accumulation compulsive, bien plus qu’une simple manie de collectionner. Cette pathologie se glisse dans le quotidien à bas bruit, s’impose sans distinction de valeur ou d’utilité des objets. Et ses dégâts ne s’arrêtent pas à la montagne de bibelots ou de papiers : santé mentale ébranlée, relations distendues, perte de qualité de vie, tout vacille.
Face à cet engrenage, les professionnels de santé mentale constatent une résistance tenace à demander de l’aide. Même lorsque les conséquences deviennent lourdes, le parcours vers le soin s’avère sinueux. Psychothérapies, soutien familial, traitements médicamenteux… chaque situation réclame un ajustement sur mesure, en tenant compte de la gravité et du contexte de vie.
Plan de l'article
Comprendre la thésaurisation : quand l’attachement aux objets devient un trouble
Ce que les psychiatres nomment thésaurisation ne se résume pas à la difficulté de jeter. Il s’agit d’une incapacité persistante à se séparer de ses biens, même si leur utilité n’est plus qu’un souvenir. On est loin du simple plaisir d’accumuler ou de la nostalgie d’une collection : ce trouble plonge profondément dans la mécanique psychique. On parle ici d’un trouble obsessionnel compulsif bien particulier, la syllogomanie, qui peut toucher dès l’enfance et ne s’arrête pas avec l’âge. Peu à peu, l’accumulation grignote chaque mètre carré, jusqu’à rendre l’espace invivable.
Les ressorts de cet attachement matériel sont multiples. Pour certains, c’est la peur du manque qui guide chaque geste. D’autres voient dans chaque objet un souvenir précieux, une part d’eux-mêmes, ou un rempart contre l’incertitude. L’idée même de se séparer d’un bien peut provoquer une angoisse envahissante, parfois accompagnée de rituels de contrôle et de rangement. Trop souvent, la honte verrouille la parole et l’isolement s’installe, tant le regard des autres est lourd à porter.
Le syndrome de Diogène pousse ce trouble à l’extrême : isolement sévère, refus de toute aide, accumulation massive, parfois jusqu’aux déchets. Les spécialistes parlent d’un cocktail complexe de facteurs : terrain familial, traumatismes, troubles anxieux, dépression.
Voici quelques conséquences concrètes qui jalonnent le quotidien des personnes concernées :
- Incompréhension familiale
- Risque d’isolement social
- Espaces saturés et perte de contrôle
La persistance à conserver des objets ne relève pas d’un simple manque de volonté. Cette réalité bouscule notre rapport aux choses, à la mémoire, à l’insécurité, à ce que l’on transmet, ou que l’on garde pour soi.
Quels impacts sur la santé mentale et le quotidien des personnes concernées ?
Le désordre chronique bouleverse la vie domestique. Quand chaque pièce se remplit jusqu’au débordement, circuler devient un défi, la routine se délite, l’ambiance vire à l’oppressant. Ceux qui vivent cette spirale parlent d’une souffrance émotionnelle aiguë. La honte, la culpabilité et un sentiment de défaite minent le moral, renforçant l’isolement social. Les visites se font rares, les fêtes de famille s’effacent, les liens se brisent, la solitude s’installe.
Mais ces difficultés ne se cantonnent pas au psychisme. L’entassement d’objets, quand il devient extrême, engendre des risques physiques bien réels : chutes, accidents domestiques, voire incendies. Dans certains cas, la présence de déchets ou de nuisibles crée un environnement insalubre, dangereux pour la santé physique. Les personnes âgées, particulièrement exposées, paient le prix fort dans ces conditions extrêmes.
Conséquences sur la santé mentale
Les répercussions sur le mental se déclinent de plusieurs façons :
- Anxiété permanente, face à l’impossibilité de maîtriser l’accumulation
- Dépression, renforcée par l’isolement et la rupture des liens sociaux
- Aggravation des troubles obsessionnels compulsifs
Dans sa version la plus sévère, le syndrome de Diogène entraîne une coupure quasi totale avec l’extérieur. Le domicile se transforme en citadelle imprenable, saturée de souvenirs et d’objets, où l’état psychique s’effondre. Souvent, c’est un voisin inquiet ou une intervention sociale qui alerte, trop tard, sur la gravité de la situation.

Des solutions existent : reconnaître les symptômes et trouver un accompagnement adapté
Prendre conscience du problème marque un premier pas décisif vers le changement. Les proches, parfois démunis, commencent par remarquer des signaux : incapacité à se séparer des objets, accumulation excessive, désordre qui s’étend. Mettre des mots sur le malaise permet d’ouvrir le dialogue, même si la stigmatisation freine encore bien des élans. Entre déni et honte, le chemin vers un accompagnement adapté reste semé d’obstacles.
Il est recommandé de consulter un professionnel de santé mentale lorsque les difficultés du quotidien deviennent ingérables. Les thérapies cognitives et comportementales (TCC) ont montré des résultats probants face à la thésaurisation compulsive. L’approche doit être personnalisée, parfois complétée par l’EMDR, afin d’apaiser le lien pathologique avec les objets. Les spécialistes de la syllogomanie accompagnent la personne dans le tri et le désencombrement progressif.
Quelques axes d’accompagnement
Voici des leviers concrets pour soutenir la personne concernée :
- Évaluation approfondie par un professionnel de santé expérimenté
- Suivi thérapeutique adapté (TCC, EMDR selon les cas)
- Mobilisation du cercle familial pour encourager le rangement étape par étape
- Accompagnement social lorsque la situation l’exige
Retrouver un équilibre, cela passe par un travail lent et en profondeur, sur les racines de l’attachement matériel. Briser le silence, c’est déjà ouvrir la porte à une vie plus libre, où les objets reprennent leur juste place.